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Randonnées et chiens de protection

Les chiens de protection sont présents pour protéger leur troupeau face à toute menace potentielle : loup, lynx, ours, chien accompagné ou non, randonneur trop intrusif, ou qui donne des signes d’agressivité, VTTiste trop pressé… En France, les éleveurs font principalement appel au Montagne des Pyrénées ou Patou, au Berger d’Anatolie ou Kangal et à la race portugaise Cão de Gado Transmontano.

C’est un fait, la fréquentation des espaces naturels par les usagers est en constante augmentation. Inévitablement, les conflits d’usages se multiplient en zone de pastoralisme. Les rencontres avec les chiens de protection sont sources de stress pour les chiens et aussi pour les usagers qui ne savent souvent pas quelles attitudes adopter. Pourtant, un nombre croissant d’informations circule.

Il ne peut y avoir de prévention sans compréhension.

SOMMAIRE

Une meilleure connaissance du chien de protection

Que faire si je rencontre un chien de protection ?

5 clés d’informations et de compréhensions

Expériences lors de randonnées

Pour conclure

Un chien de protection, sur une butte, est face à nous. Son troupeau de brebis est derrière lui.

Une meilleure connaissance du chien de protection

Le chien de protection des troupeaux n’est pas un chien d’attaque, mais bien de protection. Il ne va pas au contact à moins qu’il n’y soit contraint et ce, lorsque les signaux d’avertissement du chien n’ont pas été pris en considération.  

Ce que l’homme considère comme un danger est différent de la vision du danger du chien. Si les brebis sont apeurées, le chien va chercher à déterminer pourquoi elles ont peur : un animal sauvage, un humain par son comportement, un bruit…

Notons que selon le caractère du chien et son histoire, sa réaction aux stimuli sera différente. Ses avertissements prendront donc un caractère différent à l’attention du facteur effrayant.

Il aboie pour prévenir ses brebis qu’il y a un intrus. En parallèle, il signifie à l’intrus sa présence et qu’il ne doit pas s’approcher de son troupeau. Les brebis sont en alerte de même que l’intrus.

Tête de Kangal
Berger d'Anatolie

Si l’intrus ne tient pas compte des demandes du chien et poursuit son chemin en s’approchant du troupeau, le chien de protection entre dans une phase de stress élevé. Il se rapproche du danger potentiel tout en accentuant ses avertissements, allant du contact « simple » (pincer, attraper les vêtements) au contact sévère (mordre).

Les chiens de protection sont des chiens à qui l’on demande beaucoup. Ils gèrent seuls les évènements qui s’imposent à eux, ils évaluent les situations pour protéger leur troupeau et prennent les décisions qu’ils jugeront nécessaires. Ils doivent constamment adapter leur comportement et leurs actions aux différents contextes.

Ils sont les seuls chefs à bord. Ils doivent distinguer les situations menaçantes de celles qui ne le sont pas. Ils doivent être calmes, paisibles, donner confiance à leur troupeau et le tranquilliser, respecter l’humain, être dissuasifs envers les intrus, être autonome, et risquer leur vie pour sauvegarder leur troupeau.

L’homme exige énormément des chiens et ceux-ci n’ont pas le droit à l’erreur. Beaucoup de personnes les craignent car ils sont imposants, impressionnants, libres.

Que faire si je rencontre un chien de protection ?

De nombreux panneaux expliquent le comportement des chiens et l’attitude que nous devons adopter face aux chiens.

Des communes s’engagent pour une meilleure information comme par exemple sur le site de  la commune d’Enchastrayes dans les Alpes de Haute Provence. Si vous voyez un patou, la plupart du temps il vous a déjà repéré ou senti.

Voici quelques règles à respecter s’il vient à votre rencontre :

Tête de chien des Pyrénées qui nous regarde
Montagne des Pyrénées
  • Ne paniquez pas. Les chiens ressentent votre peur et s’en méfient énormément.
  • Ne les surprenez pas. Les chiens peuvent avoir de mauvais réflexes de défense.
  • Restez calme et faites des mouvements lents et non agressifs. Ne courrez pas, ne criez pas, n’agitez pas vos bras, ne lui jetez pas d’objets, ne le menacez pas avec vos bâtons, etc… La plupart du temps, il vient uniquement vous identifier.
  • Parlez-lui calmement pour le mettre en confiance quand il s’approche de vous. Cela vous donne également une contenance si vous avez peur.
  • Si le chien se montre amical, ne le caressez pas, ne le prenez pas en photo et ne lui donnez pas à manger – il pourrait mal interpréter vos intentions.
  • Si le chien essaye de vous intimider – cela veut dire qu’il vous considère comme une menace – éloignez-vous lentement et calmement du troupeau.
  • Ne forcez pas le passage, vous risquez de passer pour une menace
  • Contournez le troupeau de votre mieux.
  • Si le chien vous suit, ignorez-le. Ces chiens peuvent vous suivre jusqu’à ce qu’il vous considère assez loin du troupeau
  • Si vous êtes avec vos enfants, tenez-les à l’écart car ces chiens ressemblent énormément à la peluche de leurs rêves.
  • Si vous êtes avec votre chien de compagnie, tenez-le en laisse et laisser le chien de protection s’en approcher pour qu’ils se sentent et fassent connaissance.
Cão de Gado Transmontano, une race portugaise de chien de protection
Cão de Gado Transmontano

5 clés d'informations et de compréhension

1. Situations que nous serons amenés à rencontrer

–  Le chien aboie ? C’est normal, l’aboiement est une caractéristique commune à tous les chiens. Il signale ainsi sa présence et dissuade tout intrus de s’approcher du troupeau qu’il protège.
Le chien est éloigné du troupeau ? Il patrouille et fait des marquages, il n’est pas en divagation.
Le chien porte un collier à pointes ? C’est une protection pour lui, afin de ne pas être saisie à la gorge lors d’une attaque. Ce n’est en aucun cas un signe de dangerosité du chien.

2. Gestes à ne pas faire... au risque de faire monter le chien en pression

Ne pas :
–  Crier,
–  Courir ou continuer de rouler à vélo (le mouvement attire l’œil du chien, et la vitesse ne laisse pas le temps au chien d’identifier l’intrus, cela risque de déclencher un réflexe de poursuite),
–  Menacer avec un bâton, gesticuler,
–  Forcer le passage et traverser le troupeau (cela pourrait provoquer la panique des animaux),
–  Tenter de toucher une brebis (ou un autre animal du troupeau),
–  Fixer le troupeau ou prendre les brebis en photo (l’intérêt focalisé sur le troupeau est source de stress car il représente l’intérêt d’un prédateur potentiel),
–  Utiliser une bombe à poivre, ne pas jeter des pierres,
–  Marcher droit sur le chien (il s’agit d’un acte de menace pour le chien).

Un Kangal au milieu d'un troupeau de moutons
Berger d'Anatolie

3. Signaux de stress à détecter chez le chien

–  Le chien se lèche les babines ou la truffe,
–  Le chien baille,
–  Le chien détourne la tête, le regard ou le corps,
–  Le chien s’immobilise.

4. Conditions stressantes pour le troupeau et le chien

–  Météo difficile (brouillard, temps pluvieux),
–  Terrains accidentés, milieux boisés (mauvaise perception de l’arrivée des intrus).

5. Signaux d’apaisement

Pour faire baisser la pression et apaiser les situations, voici quelques conduites à penser :

–  Se signaler à l’approche d’un troupeau,
–  Bailler et tourner la tête, faire des mouvements des yeux,
–  S’immobiliser systématiquement lorsque le chien aboie quelle que soit la distance (le chien sait ainsi qu’il a été entendu et il peut nous identifier),
–  Marcher lentement et ne pas surprendre le troupeau et le chien (pour permettre au chien d’identifier l’intrus),
Contourner le troupeau lorsque cela est possible (quitte à s’éloigner du sentier qui traverserait un troupeau), ou reculer si le terrain ne le permet pas,
–  Parler calmement, doucement au chien (chercher ainsi à rassurer le chien sur les intentions de l’intrus),
–  Le regarder avec bienveillance sans défiance,
–  Lorsque le chien s’approche trop, mettre un objet entre le chien et soi, le chien prend ainsi contact avec l’objet et non avec l’humain et l’on conserve une distance (ex : casquette, chapeau, veste…).

Expériences lors de randonnées

Les chiens de protection sont des chiens extraordinaires, à qui l’humain demande énormément. J’ai rencontré de nombreux patous mais aussi des kangals au cours de mes randonnées, je n’ai jamais eu de problème et ce depuis des années. Je suis toujours attentive à l’environnement et je suis prête à anticiper. A chaque rencontre, je m’adapte à la situation car c’est à l’homme de s’adapter au travail du chien. Chaque chien possède son individualité, sa personnalité propre, son expérience de vie. Ils ne sont pas des machines. Par exemple, un chien ayant eu une nuit de surveillance compliquée sera fatigué, sous tension, il est possible alors qu’il soit moins tolérant.

Il m’est même arrivé de faire un bivouac, accompagnée et « gardée » toute la nuit par un patou.

Un patou est couché, avec son troupeau de brebis.
Patou et son troupeau

Par contre, il m’est aussi arrivé de devoir rebrousser chemin… presque à l’arrivée de la randonnée après 3 heures de montée. Ce jour-là, deux chiens n’ont pas souhaité ma présence, pourtant très éloignée du troupeau. Le sentier, entre un torrent et une pente escarpée, passait devant la bergerie et il était peu fréquenté par les touristes. Il n’y avait aucun contournement possible. De mon point de vue, je ne représentais pas une menace à cette distance, mais eux ont estimé que j’en étais une pour leurs brebis. Je suis partie et le calme est revenu. Je me suis installée plus bas, bien plus bas pour pique-niquer, et ils ont fait leur retour ! Bon, je suis redescendue encore !

Pour conclure

Le mot de la fin de Jean-Marc Landry, biologiste et éthologue, résume bien le travail demandé aux chiens de protection. 

« On est très exigeant avec ces chiens :
on leur dit quand des randonneurs passent il ne faut pas réagir,
quand des randonneurs passent trop près du troupeau il faut réagir,
quand le chien du randonneur rentre dans le troupeau il faut réagir,
s’il y a des vols d’agneaux il faut réagir,
si le chien est tenu en laisse il ne faut pas réagir. […] 
Ce sont des chiens extraordinaires ».

Je vous invite à visionner les vidéos publiées sur les chiens de protection par l’institut IPRA où Jean-Marc Landry nous explique comment se comporter sur le terrain face à des chiens de protection. Elles sont très instructives et extrêmement enrichissantes.

Un berger caresse un Kangal. Derrière, les moutons paissent.

Cet article a été réalisé par LittleFox, comportementaliste canin.

Photos n° 1.5.6.7 : pexels.com / n° 2.3 : pixabay.com / n° 4 : wikipédia.org (https://en.wikipedia.org/wiki/Cão_de_Gado_Transmontano)